Cour Supreme Mexique legalisation cannabis

La Cour Suprême du Mexique laisse la porte ouverte à la légalisation du cannabis

  • Une décision protège les membres de la société SMART, afin qu’ils puissent cultiver, récolter, posséder et transporter du cannabis pour usage personnel. Même s’ils sont les seuls à bénéficier directement de cette décision, toute personne peut demander une protection similaire. Bénéficier des mêmes avantages dépendra néanmoins de la Cour suprême. Cette résolution adoucit la voie pour les autres utilisateurs et marque le début de la fin du prohibitionnisme.
Cour Supreme Mexique legalisation cannabis

La société mexicaine de consommation personnelle responsable et tolérante du Mexique (SMART), a toujours eu pour but, depuis sa naissance en 2013, celui de forcer le débat sur la légalisation du cannabis au Mexique. Ce pays est devenu le deuxième producteur mondial de cannabis et le principal exportateur aux États-Unis.

Pour cette raison et tenant compte du fait que la consommation de cannabis a été dépénalisée en 2009 (Elle est néanmoins punissable sur le plan administratif), depuis des mois, le collectif a demandé au ministère de la santé du Mexique l’autorisation de planter, de préparer, de posséder et de transporter du cannabis pour la consommation personnelle récréative.

Sans surprise, leur demande a été rejetée par l'Administration, qui considère que celle-ci porte atteinte à la législation sanitaire. Le groupe a alors décidé d’essayer la voie légale, enchainant les recours jusqu’à atteindre la Cour suprême de la nation.

Malgré tous les refus rencontrés en chemin, leur affaire a fini entre les mains du juge Arturo Zaldívar, un des plus progressistes de l'institution, qui a décidé de miser sur cette affaire et de faire tout son possible pour que ses quatre compagnons de la première chambre fassent de même.

Dans ce but, le 28 octobre dernier Zaldivar a présenté un projet avec lequel il soutenait une requête présentée par quatre membres de SMART et avec lequel il prétendait faire en sorte que divers articles de la Loi générale de la santé, soient déclarés inconstitutionnels afin de réduire le blocus qui étouffe le cannabis et ses utilisateurs.

La résolution judiciaire, si attendue pendant des jours pour son importance historique, a été prise le 4 novembre et, bien qu'elle n'implique pas la légalisation du cannabis à des fins récréatives, elle laisse la porte ouverte afin que cela puisse arriver. Humberto Castillejos, conseiller juridique à la présidence, a expliqué que le cannabis « nuit à la santé individuelle et publique, il est alors constitutionnellement valide que l'État mexicain le réglemente ». Malgré cela, il considère qu’interdire de manière absolue, la culture pour un usage personnel à des fins récréatives est une « réglementation excessive ».

C’est pourquoi, cette haute autorité a reconnu, grâce à une majorité de quatre voix, le droit des quatre personnes de SMART qui ont demandé la protection. C’est pour cela aussi, que les médias locaux considèrent directement que la Cour a dit oui au cannabis.

Ces utilisateurs pourront planter, cultiver, récolter, préparer, posséder et transporter du cannabis à des fins de consommation personnelle sans être sanctionnés ni de manière pénale, ni sur le plan administratif. De plus, aucune autre personne au-delà des bénéficiaires de cette résolution ne peut avoir recours à cette décision dans le but d'éviter les sanctions pénales prévues par la Loi. Malgré cela, il s’agit d’une étape importante, puisque c'est la première protection associée au cannabis, donnée par la plus haute instance judiciaire du pays et pouvant créer jurisprudence.

Dans tous les cas, la commercialisation, la vente et le transfert de cannabis à une tierce personne sont toujours explicitement interdits et punissables. De même que, tel que l’a établi Zaldivar, la consommation de cannabis n’est pas faisable si d’autres personnes peuvent, d’une certaine manière, être affectées. Ainsi que, fumer devant elles, à moins qu’elles aient exprimé leur consentement. C'est pourquoi sa consommation en public ou devant des mineurs n'est pas autorisée. De même que la consommation reste interdite durant les activités professionnelles, lorsque l'employé est responsable d'autres personnes, tels que les chauffeurs.

Ce sera la Cofepris, la Commission fédérale pour la protection contre les risques sanitaires, qui dépend du ministère de la santé, la responsable de délivrer les permis. Toutefois, l'entité n'est pas obligée de fournir des graines à ces quatre utilisateurs.

C’est précisément pour cette raison, que Jorge Mario Pardo Rebolledo, l’un des juges qui décidaient sur la proposition, a annoncé dès le début de la réunion qu’il était contre cet amparo. Il soutient que, même si le fait de consommer et de cultiver du cannabis est permis, obtenir des graines et les planter est un délit dans ce pays, il estime donc qu'il sera difficile de garantir le nouveau droit exclusif qui a été accordé à ces quatre utilisateurs de SMART. En définitive, « la partie initiale de cette chaîne de consommation personnelle reste un délit ».

Par ailleurs, Cofepris devra également fixer la limite d’herbe qui pourra être cultivée et possédée, bien que le pouvoir législatif sera probablement le premier à se prononcer là-dessus.

En outre, tel que le réclamait Zaldivar, la récente décision déclare l’inconstitutionnalité partielle des cinq articles de loi générale sur la santé (les 235, 237, 245, 247 et 248) qui jusqu'à présent limitaient totalement l’ensemencement, la culture et la possession de cannabis pour usage personnel.

Toutefois, cette inconstitutionnalité ne soulève qu’un vide juridique et n'invalide pas les autres lois pénales et administratives affectant le cannabis. Pour cette raison, une dépénalisation totale de l'usage de cannabis requiert une modification juridique. En effet, d’après les avocats mexicains, pour que cette décision ait une portée plus large, la Cour devrait résoudre cinq jugements d'amparo de la même manière qu’elle a résolu celui-ci. On obtiendrait ainsi jurisprudence contre les articles de loi générale sur la santé mentionnés.

Afin que d’autres personnes puissent utiliser du cannabis à des fins récréatives avec les mêmes avantages que les utilisateurs de SMART, il leur faudra réclamer indépendamment leur propre protection, mais elles pourront cependant, compter sur les conseils de cette société, comme l'a indiqué son avocat.

Au cours du débat sur cette proposition, la juge Olga Sánchez Cordero a soutenu la décision en admettant le paternalisme intensif existant sur les utilisateurs. Toutefois, elle a exprimé son inquiétude envers « la protection minimale pour la santé et l'ordre public » qui pourrait en dériver. Pendant ce temps, le juge José Ramón Cossío a annoncé son vote en faveur de la cause, même s’il se demandait pourquoi les universités publiques et scientifiques n’avaient pas été consultées pour plus de soutien sur le contenu de la sentence.

Il a également regretté que cette décision n’ait pas demandé de revoir la politique de drogues dans ce pays : « Nous devons inciter toutes les autorités de l'État mexicain impliquées dans les politiques publiques nationales sur les drogues, à revoir le modèle prohibitionniste », dit-il. Il pense qu’il faut redéfinir le cadre normatif afin d’empêcher que ne soient violés les droits des citoyens et pour que le problème puisse se centrer sur le point de vue de la santé publique. Cependant, son idée n'a pas été approuvée.

Entre-temps, le juge Arturo Zaldívar estime toujours que la prohibition absolue généralisée est « disproportionnée » et contraire au libre développement de la personnalité des utilisateurs. La décision de manière responsable de consommer ou non du cannabis correspond à chaque individu.

Pour l’instant, si plus d’utilisateurs mexicains veulent avoir le privilège de ne pas être sanctionnés s’ils en consomment ou en cultivent, ils devront demander une protection. Comme SMART et Zaldivar ont soutenu que l'interdiction est contraire à l'épanouissement de la libre personnalité de chaque utilisateur, toute personne réclamant cette protection devrait pouvoir l'obtenir, même si cela ne dépend que des tribunaux. Cette résolution facilite le chemin d'accès et, si nombreux osaient la réclamer, le tribunal déciderait comme il le fait actuellement, et la légalisation réelle au Mexique pourrait se trouver au prochain tournant.

10/11/2015

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